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27 JUIN 2025
NATO, TRUMP, MACRON : QUEL AVENIR POUR LA DÉFENSE EUROPÉENNE APRÈS LE SOMMET DE LA HAYE ?
Donald Trump impose sa logique : payer plus pour rester sous protection américaine. A l’inverse, Emmanuel Macron pousse pour une autonomie stratégique européenne. Entre les deux, une voie médiane cherche à européaniser l’OTAN sans la briser.
L’enjeu est clair : transformer ces moyens nouveaux en puissance réelle. Mais comment y parvenir dans une Europe encore divisée, désarmée sur le plan industriel, hésitante sur le plan politique ? Peut-on construire une défense commune sans renoncer à l’Alliance ? Jusqu’où aller dans l’émancipation sans fracturer l’équilibre transatlantique ?
En 2023, seuls 11 des 32 pays membres de l’OTAN respectaient l’objectif des 2 % du PIB consacrés à la défense, fixé en 2014 au sommet de Newport. La France est à 1,9 %, l’Allemagne à 1,6 %, tandis que les États-Unis restent largement en tête à plus de 3,5 %. (Source : OTAN, rapport annuel 2023)
Les États-Unis assurent à eux seuls 68 % de l’ensemble des dépenses militaires des pays de l’Alliance, contre 4,5 % pour l’Allemagne, 2,5 % pour la France, et moins de 1 % pour plusieurs pays d’Europe de l’Est. (Source : SIPRI, World Military Expenditure 2023)
Donald Trump a déclaré en février 2024 qu’il encouragerait la Russie à « faire ce qu’elle veut » à un pays membre de l’OTAN qui ne paierait pas sa part pour sa propre défense. Cette déclaration a relancé la controverse sur la garantie réelle de l’article 5. (Source : CNN, 10 février 2024)
Emmanuel Macron, en juin 2023 à Bratislava, a plaidé pour une « autonomie stratégique européenne » permettant à l’Europe de ne plus dépendre des États-Unis pour sa sécurité et de « choisir ses partenaires, pas de s’en remettre à eux par défaut ». (Source : Discours à Globsec, présidence de la République française)
L’Union européenne dispose de 27 armées nationales, avec 178 systèmes d’armement différents (contre 30 aux États-Unis), très peu interopérables, et peu d’achats groupés. Cette fragmentation limite drastiquement l’efficacité d’une défense européenne intégrée. (Source : European Defence Agency, rapport CARD 2022)
80 % des achats d’équipements militaires par les États européens ont été réalisés hors d’Europe en 2022, majoritairement aux États-Unis, ce qui révèle la dépendance structurelle des armées européennes aux industriels non-européens. (Source : European Defence Agency, données 2023)
Selon la RAND Corporation, un retrait total des États-Unis de l’OTAN impliquerait pour l’Europe une augmentation de ses dépenses militaires annuelles d’au moins 300 à 400 milliards d’euros pour maintenir un niveau comparable de protection. (Source : RAND Corporation, rapport 2020)
Les opinions publiques restent majoritairement favorables à l’OTAN en Europe, avec 65 % d’opinions positives en moyenne, mais des disparités fortes : 82 % en Pologne, seulement 45 % en France. (Source : Pew Research Center, mars 2023)
71 % des citoyens européens se déclarent favorables à une armée européenne commune, mais aucun gouvernement ne veut céder le contrôle national de ses troupes ou de ses chaînes de commandement. (Source : Eurobaromètre spécial 2022)
L’OTAN maintient à ce jour 30 000 soldats en alerte immédiate, 40 000 en rotation dans l’Est de l’Europe, et conserve l’essentiel de ses capacités de commandement centralisées à Bruxelles, mais largement sous direction américaine. (Source : OTAN, Force Structure Overview 2023)
Réunis à La Haye les 24 – 25 juin 2025, les 32 pays membres de l’Alliance Atlantique ont adopté une déclaration commune…
Dans cette logique, le sommet a été l’occasion de réaffirmer le principe de solidarité défensive inscrit dans l’article 5 du Traité de Washington : une attaque contre l’un est une attaque contre tous. Les investissements annoncés comprennent 3,5 % du PIB pour les capacités militaires de base, et jusqu’à 1,5 % pour la protection des infrastructures critiques.
La majorité des dirigeants européens se sont montrés enthousiastes, soulignant la souplesse du cadre retenu. La Première ministre italienne Giorgia Meloni a salué des objectifs « flexibles et atteignables », assurant que l’Italie n’aurait pas à sacrifier d’autres priorités budgétaires. Le Canada, par la voix de Mark Carney, s’est engagé à suivre l’effort, tout comme la Finlande, la Pologne, et même l’Espagne — malgré les critiques virulentes de Donald Trump à l’égard de Pedro Sanchez, jugé trop timide en matière de réarmement. Trump a menacé Madrid de représailles commerciales, affirmant que « l’économie de l’Espagne pourrait être complètement détruite » si elle ne s’alignait pas sur les 5 %.
Dans ce concert martial, la voix d’Emmanuel Macron a tranché nettement. Le président français a salué l’engagement collectif, mais dénoncé une incohérence stratégique fondamentale : « On ne peut pas demander aux Européens de réarmer massivement tout en déclenchant une guerre commerciale contre eux. » Il a appelé à une désescalade tarifaire entre alliés et à une « véritable paix économique », visant directement les taxes douanières américaines sur les produits européens. Macron a également réitéré son attachement à l’autonomie stratégique de l’Europe, insistant sur le renforcement de la base industrielle de défense du continent, ainsi que sur la nécessité d’un dialogue avec les puissances nucléaires régionales, comme l’Iran.
En marge des discussions officielles, Donald Trump a multiplié les gestes politiques : rencontre chaleureuse avec Volodymyr Zelensky (dont il dit qu’elle « n’aurait pas pu mieux se passer »), entretien amical avec Geert Wilders sur l’immigration, et déclarations provocantes sur le conflit Iran-Israël, comparé à « une bagarre de cour d’école » où « Papa doit parfois hausser le ton ».
Dans cette séquence, Emmanuel Macron apparaît relativement isolé. Tandis que la plupart des dirigeants ont préféré s’aligner sur la feuille de route américaine, quitte à minimiser les tensions commerciales ou les divergences stratégiques, le président français a cherché à défendre une ligne plus autonome, plus européenne, mais sans relais forts à ses côtés. Dans le nouvel équilibre de l’Alliance, il semble isolé, voire à contre-courant.
Le sommet de La Haye marque la victoire de la ligne Trump. Après des années de tergiversations, l’Europe accepte enfin de payer le prix de sa sécurité…
MACRON A RAISON. L’autonomie stratégique européenne n’est pas un caprice gaullien. C’est une nécessité géopolitique face au pivot américain vers l’Asie. Washington l’a dit clairement : la Chine est la priorité, l’Europe un théâtre secondaire.
Dans cette logique, l’OTAN devient un instrument de projection américaine, non de défense européenne. Le sommet de La Haye en est l’illustration parfaite : les Européens s’engagent à dépenser 5% de leur PIB, mais sans garantie sur l’utilisation de ces fonds. Achèteront-ils européen ou américain ? Développeront-ils leur industrie ou resteront-ils dépendants ?
La position de Macron, bien qu’isolée à La Haye, révèle cette contradiction fondamentale : comment réarmer l’Europe tout en subissant une guerre commerciale américaine ? Comment parler de souveraineté tout en important massivement du matériel militaire américain ? L’incohérence dénoncée par le président français n’est pas que rhétorique : elle est stratégique
L’exemple ukrainien est révélateur. Les États-Unis fixent les règles d’engagement, contrôlent les livraisons d’armes, décident des escalades. L’Europe paie et s’aligne. Résultat : 200 milliards d’euros d’aide sans stratégie de sortie, des économies européennes affaiblies par les sanctions, une dépendance énergétique accrue. Qui a perdu le plus dans cette guerre ? Certainement pas les États-Unis.
Cette logique se retrouve partout. Sur la tech, l’Europe applique les sanctions américaines contre Huawei tout en perdant son marché chinois. Sur l’énergie, elle renonce au gaz russe bon marché pour importer du GNL américain trois fois plus cher. Sur l’industrie, elle achète américain au nom de l’interopérabilité OTAN.
Pourtant, d’autres modèles existent. Israël développe ses propres systèmes (Iron Dome, Trophy) tout en bénéficiant de l’aide américaine. La Turquie produit ses drones (Bayraktar) malgré les embargos occidentaux. L’Inde refuse de choisir entre Washington et Moscou, développe sa base industrielle, exporte ses armes.
La France a montré la voie. Avec ses interventions au Sahel, elle a prouvé qu’une puissance européenne peut agir de manière autonome. Le Rafale s’exporte sans demander l’autorisation à Washington. La dissuasion nucléaire française protège l’Europe sans tutelle américaine. L’industrie de défense française (Dassault, Thales, Naval Group) rivalise avec les géants américains.
Mais la France seule ne peut pas faire l’Europe de la défense. Il faut un écosystème industriel, des marchés intégrés, une doctrine commune. C’est le sens des projets franco-allemands : SCAF pour l’aviation de combat, MGCS pour les chars du futur. Lents, complexes, mais indispensables pour réduire la dépendance.
L’argument du coût ne tient pas. La Corée du Sud a développé en 20 ans une industrie d’armement exportatrice en partant de rien. Ses chars K2 rivalisent avec les Leopard allemands, ses frégates s’exportent, ses missiles balistiques inquiètent Pyongyang. Tout cela avec un PIB inférieur à celui de l’Italie.
L’autonomie européenne n’est pas l’autarcie. C’est la capacité de choisir ses partenaires sans subir leurs choix. De coopérer sans abdiquer. D’être allié sans être assujetti. Mais cette autonomie suppose du courage politique : accepter l’isolement temporaire plutôt que l’alignement permanent. À La Haye, Macron était seul contre tous. Peut-être avait-il tort tactiquement. Mais il avait raison stratégiquement.

« L'Europe Bisounours préfère externaliser ses guerres pour ne surtout pas avoir à y envoyer ses soldats » Clemenceau
Sujet de la veille :
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