ACTUALITÉS · SOCIÉTÉ · ÉCONOMIE · TECHNOLOGIE

 1er AOUT 2025 (#55)

IA DANS LE SERVICE PUBLIC : SOLUTION OU CAUCHEMAR A LA FRANCAISE ?

En avril 2025, le gouvernement français a lancé un appel à manifestation d’intérêt pour généraliser l’usage de l’intelligence artificielle générative…

En avril 2025, le gouvernement français a lancé un appel à manifestation d’intérêt pour généraliser l’usage de l’intelligence artificielle générative (IAG) dans les administrations. Objectif officiel : simplifier la vie des agents sans réduire les effectifs.

Pourtant, les promesses d’efficacité de l’IA – gain de temps, productivité, simplification – laissent entrevoir un potentiel de transformation radicale.

Mais la France persiste à écarter toute logique d’économies ou de réduction de postes, là où le Royaume-Uni, le Canada ou Hong Kong utilisent déjà l’IA pour automatiser, moderniser… et supprimer des milliers d’emplois publics.

Faut-il craindre une IA étatique qui automatise Kafka sans rationaliser ? Ou dénoncer une hypocrisie française pour faire semblant qui va coûter cher au contribuable ?

Derrière l’innovation technologique, une vraie question politique : à quoi bon l’IA si elle ne sert pas à transformer ?

FAITS & CHIFFRES
L’intelligence artificielle offre sept avantages majeurs aux entreprises, notamment la productivité, la réduction des coûts…
FAITS & CHIFFRES

L’intelligence artificielle offre sept avantages majeurs aux entreprises, notamment la productivité, la réduction des coûts, la personnalisation, la rapidité, la fiabilité, l’innovation et la compétitivité (Bpifrance – “Intelligence artificielle : les 7 avantages pour les entreprises”, février 2025)

Le gouvernement français a lancé un appel à manifestation d’intérêt (AMI) pour accélérer l’intégration de l’IA générative dans les services publics à partir d’avril 2025 (Gouvernement français – “Intelligence artificielle : le gouvernement lance un AMI pour le secteur public”, 7 avril 2025)

Entre 2017 et 2022, les effectifs de la fonction publique ont augmenté de 178 000 agents, dont 96 000 pour l’État, malgré les efforts d’automatisation (INSEE – “Bilan de l’emploi public 2023”, décembre 2023)

Le projet de loi de finances 2025 prévoit 2 264 créations nettes de postes dans la fonction publique d’État, principalement dans les ministères régaliens (Ministère des Finances – “PLF 2025”, septembre 2024)

Le Royaume-Uni prévoit de supprimer 10 000 postes publics et de réduire de 15 % les coûts administratifs d’ici 2029 grâce à l’introduction massive de solutions d’IA (Cabinet Office – “AI to save billions, modernise civil service”, mars 2025)

Le Premier ministre britannique Keir Starmer a signé des accords avec Microsoft et Anthropic pour équiper les fonctionnaires des outils d’IA Copilot et Claude (The Guardian, “UK government signs AI tools deal with Microsoft and Anthropic”, 3 avril 2025)

Hong Kong a déployé son assistant gouvernemental HKGAI V1 dans 70 agences publiques, entraînant la suppression de 10 000 postes administratifs (South China Morning Post – “Hong Kong’s AI drive cuts civil service jobs”, mars 2025)

Le Canada a annoncé la suppression de 5 000 postes dans la fonction publique fédérale grâce à l’IA, tout en assurant une qualité de service équivalente (Radio-Canada – “L’IA dans la fonction publique ne fera pas baisser la qualité”, janvier 2025)

Le traitement manuel d’une enquête publique au Royaume-Uni coûte environ 100 000 livres par dossier, un montant désormais économisé grâce à l’automatisation par IA (GOV.UK – “Public inquiries: modernisation through AI”, février 2025)

Selon Laurent Marcangeli, l’IA doit servir d’appui aux agents publics sans pour autant les remplacer, soulignant une vision d’assistance plutôt que de substitution (Vie-publique.fr – “Laurent Marcangeli – IA et fonction publique”, février 2025)

Le gouvernement fédéral américain déploie l’IA dans des secteurs comme les impôts, la sécurité, l’aviation ou la défense pour accroître l’efficacité, réduire les effectifs et économiser des milliards (Washington Post – “The government wants AI to fight wars and review your taxes”, 14 juillet 2025)

Depuis début 2025, plus de 275 000 suppressions ou départs volontaires ont eu lieu dans la fonction publique américaine dans le cadre du programme d’automatisation DOGE (Wikipedia – “2025 United States federal mass layoffs”, 26 juin 2025)

Les autorités américaines ont instauré un gel des embauches fédérales à partir du 20 janvier 2025, reconduit jusqu’au 15 octobre, pendant la montée en puissance des usages de l’IA (Wikipedia – “2025 United States federal hiring freeze”, 20 janvier 2025)

Un test mené par le gouvernement britannique révèle que l’IA pourrait faire gagner près de deux semaines de travail par an à chaque fonctionnaire en automatisant des tâches simples comme les e-mails (GOV.UK – “AI could save civil servants nearly 2 weeks a year”, mai 2025)

Selon le Financial Times, l’usage généralisé de l’IA dans l’administration britannique pourrait permettre jusqu’à 45 milliards de livres d’économies annuelles, soit 4 à 7 % des dépenses publiques (Financial Times – “Will AI save the UK government £45bn a year?”, 14 mars 2025)

La ville de San Jose a acheté 89 licences ChatGPT pour un coût de 35 000 dollars afin de former 1 000 agents municipaux à l’usage de l’IA, avec des gains espérés de 20 à 50 % en efficacité (New York Post – “San Jose Mayor wants city workers to use AI”, 17 juillet 2025)

À l’échelle mondiale, l’IA permettrait une multiplication par quatre de la productivité dans les emplois utilisant massivement les outils numériques, y compris dans le secteur public (PwC – “AI-linked to a fourfold increase in productivity growth”, 3 juin 2025)

Le sommet européen « AI Action Summit » de février 2025 a lancé un fonds d’investissement de 200 milliards d’euros pour développer des usages publics et industriels de l’IA en Europe (Wikipedia – “AI Action Summit”, 11 février 2025)

FLOP. L’IA dans l’administration: une solution pour faire tourner plus vite la machine en rond ? En France, même les révolutions technologiques deviennent des moyens de ne rien changer…
FLOP. L’IA dans l’administration française ? Une machine pour faire tourner plus vite la machine en rond ?… En France, même les révolutions technologiques deviennent des moyens de ne rien changer. L’intelligence artificielle ne fait pas exception.

Au lieu de secouer une administration hypertrophiée, elle risque fort d’en devenir le meilleur soutien. Une béquille algorithmique pour une machine qui boite depuis des décennies, mais qui refuse obstinément d’apprendre à marcher autrement.

On nous vend l’IA comme un outil de simplification. Mais pour quoi faire, au juste ? Alléger les normes ? Non. Les rendre lisibles. Réduire les procédures ? Non plus. Juste les automatiser. Supprimer les postes redondants ? Surtout pas. Seulement les « assister ».

En résumé, l’IA va rendre plus facile… l’existant, plus supportable la complexité, moins visible l’absurdité. Elle ne va pas réformer le système. Elle va le lubrifier. Résultat : les lenteurs d’hier seront traitées plus facilement, avec supervision humaine, mais en plus grand nombre, avec la même logique.

C’est le comble de l’innovation sans vision : mettre de l’IA sur un millefeuille administratif pour mieux en gérer les couches. Là où d’autres pays osent trancher, rationaliser, réduire les coûts, la France s’accroche à ses effectifs publics comme à un trésor. Même l’idée de « départs volontaires » est écartée.

L’IA devient un gadget chic pour faire croire qu’on bouge, sans toucher à rien. Pire, ce vernis technologique pourrait même légitimer de nouvelles complexités. Pourquoi simplifier un impôt si une IA peut expliquer comment le calculer ? Pourquoi clarifier une règle si l’IA vous la résume en langage clair ? Le danger est là : l’IA risque de conforter le système dans sa complexité, de le rendre indiscutable parce que désormais… compréhensible.

L’IA, dans cette version française, n’est pas un levier de transformation, mais un outil d’autodéfense. On mets du neuf pour que l’ancien dure…

FLIP. Dans un monde qui court après la vitesse, la France a raison de choisir la prudence. Là où d’autres pays comme le Royaume-Uni…
FLIP. Dans un monde qui court après la vitesse, la France a raison de choisir la prudence. Là où d’autres pays comme le Royaume-Uni ou Hong Kong brandissent l’intelligence artificielle comme un outil de réduction massive des effectifs publics, Paris préfère miser sur un déploiement au service des agents et des usagers. C’est une différence culturelle, stratégique, politique. Et elle n’a rien d’un retard ou d’un tabou.

Ce que défend la France, c’est une certaine idée du service public : une administration au contact des citoyens, incarnée, territorialisée, fondée sur l’égalité d’accès, la continuité, la proximité. Dans ce cadre, l’IA n’est pas une solution miracle mais un outil parmi d’autres. Elle peut fluidifier les démarches, réduire la surcharge bureaucratique, mieux aiguiller les demandes, améliorer la relation avec les usagers. Mais elle ne remplacera jamais l’examen attentif d’un dossier complexe, ni la présence humaine dans les territoires oubliés.

En refusant d’annoncer, comme le fait Keir Starmer, la suppression de 10 000 postes de fonctionnaires à horizon quatre ans, la France évite de prendre la technologie pour un projet politique en soi. La puissance publique se gère comme une entreprise.

Elle doit répondre à des besoins de justice sociale, de solidarité, de souveraineté. Introduire l’IA dans l’administration, oui — mais pas pour délégitimer les agents, ni pour créer de nouveaux déserts humains où le dernier lien sera un chatbot sans âme.

La voie française consiste à outiller d’abord, à évaluer ensuite, à ajuster sans brutalité. Le ministre Laurent Marcangeli l’a dit clairement : l’IA est là pour simplifier la vie des agents. Les administrations françaises expérimentent déjà des IA pour résumer des textes réglementaires, assister à la gestion des RH ou à la relation usager. Mais elles le font avec la volonté d’accompagner les personnels, pas de les disqualifier.

Ce choix est cohérent avec une tradition républicaine de service public humain, où la technologie vient renforcer l’action.

FLAP. L’intelligence artificielle dans l’administration française ? Pourquoi pas. Mais pour quoi faire ? À entendre les déclarations du gouvernement…
FLAP. L’intelligence artificielle dans l’administration française ? Pourquoi pas. Mais pour quoi faire ? À entendre les déclarations du gouvernement, il s’agirait uniquement de « simplifier la vie des agents » et non de réduire les effectifs ou de rationaliser les coûts. Une position confortable, mais profondément incohérente.

Car si l’IA permet réellement d’automatiser des tâches, d’accélérer les traitements, d’optimiser la gestion… alors pourquoi refuser d’en tirer toutes les conséquences en termes d’organisation, de dépenses et d’effectifs ?

Le contraste avec nos voisins est saisissant. Le Royaume-Uni prévoit la suppression de 10 000 postes de fonctionnaires, une baisse de 15 % des coûts de fonctionnement et des partenariats assumés avec des géants technologiques pour doper la productivité des services publics. Le Canada et Hong Kong suivent la même voie. Et la France ? Elle ajoute 2 264 postes supplémentaires dans son budget 2025. Cherchez l’erreur.

Ce refus d’utiliser l’IA comme levier de transformation est révélateur d’une pathologie bien française : l’incapacité à articuler modernisation technologique et réforme structurelle. L’IA n’est pas une finalité. C’est un outil.

Si elle ne permet ni de faire mieux, ni de faire plus vite, ni de faire moins cher, alors elle devient un gadget coûteux, un habillage high-tech pour une bureaucratie inchangée.

Cette prudence excessive risque de transformer une formidable opportunité en simple opération de communication.

L’appel à manifestation d’intérêt lancé en avril 2025 ? Un signal flou, sans cap budgétaire, sans indicateurs de performance, sans objectifs de réorganisation. On parle de souveraineté numérique, de confort des agents, d’expérimentation… mais jamais de résultats concrets ni d’impact mesurable sur les délais, les doublons ou la masse salariale.

Refuser de penser l’IA comme un levier de productivité, c’est refuser le changement, c’est l’agilité. C’est maintenir un système saturé de procédures, de sur-effectifs, d’inerties, en espérant qu’un outil magique viendra résoudre des problèmes sans bousculer personne.

Il ne s’agit pas de supprimer massivement, brutalement. Il s’agit de faire levier sur une technologie sans précédent qui peut vraiment aider le pays à améliorer radicalement ses services publics et la valeur ajoutée de ses agents et mieux répondre aux besoins du public.

« En France, l’IA ne remplacera pas des fonctionnaires. Elle va leur tenir compagnie » Raymond Aron

BILLET. Le gouvernement français affiche un enthousiasme apparent pour l’intelligence artificielle générative. Les discours sont lissés, les appels à projets s’accumulent, les promesses se veulent rassurantes…
BILLET. Le gouvernement français affiche un enthousiasme apparent pour l’intelligence artificielle générative. Les discours sont lissés, les appels à projets s’accumulent, les promesses se veulent rassurantes : il ne s’agit pas de remplacer l’humain, mais de l’assister, de lui simplifier la vie.

Pourtant, tout dans cette approche trahit une profonde ambiguïté. Car si cette technologie est bel et bien capable de transformer notre administration, rien n’est réellement fait pour l’y autoriser.

Ailleurs, l’intelligence artificielle n’est pas traitée comme un gadget, mais comme un levier stratégique. Au Royaume-Uni, le chef de l’opposition Keir Starmer a inscrit l’IA au cœur d’un plan de transformation publique. Il ne parle pas d’outils d’assistance, mais de productivité, d’efficacité, de réduction de coûts. En quatre ans, son objectif est clair : baisser de 15 % les dépenses de fonctionnement, supprimer 10 000 postes et réduire la dépendance aux cabinets de conseil. Microsoft Copilot est déjà utilisé pour rédiger des documents administratifs, Claude d’Anthropic pour automatiser l’analyse des consultations publiques. Résultat : des délais réduits de plusieurs mois et des millions d’euros économisés.

À Hong Kong, la stratégie est tout aussi assumée. Le système HKGAI V1 est opérationnel dans 70 agences gouvernementales. Il rédige, traduit, répond aux usagers. Ce que l’on présente en France comme une simple expérimentation est ailleurs déjà un standard. La finalité est économique, assumée : contenir les déficits en réduisant massivement la charge salariale.

Même logique aux États-Unis, où des services comme l’IRS ou le Bureau of Labor Statistics utilisent des IA pour analyser et croiser des volumes massifs de données — là où des équipes humaines mettaient plusieurs semaines, l’IA opère en quelques heures, avec plus de fiabilité et moins d’erreurs.

Et la France ? Elle en est à tester trois prototypes dans des ministères pilotes. Elle discute, observe, temporise. L’IA est abordée comme une technologie potentiellement utile, mais à condition de ne rien changer aux structures existantes. Elle devient un outil discret, sans effet de rupture, soigneusement encastré dans un système qui ne veut pas bouger.

Ce n’est pas l’IA qu’il faut redouter, c’est notre manière de faire semblant de s’en servir à moitié.

En théorie, cette technologie pourrait être l’occasion d’un débat de fond sur le rôle de l’État, l’organisation des services publics, la place de l’humain dans l’administration du XXIe siècle. Mais rien de tout cela n’est sérieusement mis sur la table. On préfère ménager l’existant. Mieux vaut un outil tiède qui ne fâche personne qu’un outil performant qui oblige à repenser le fonctionnement.

L’intelligence artificielle peut pourtant être utile, concrètement, immédiatement. Elle peut automatiser la lecture et le tri des courriers administratifs, identifier les urgences, orienter les demandes vers les bons services. Elle peut générer des synthèses réglementaires pour faire gagner un temps précieux aux agents. Elle peut optimiser les plannings, les affectations et les ressources humaines en fonction des pics d’activité. Elle peut détecter les dossiers bloqués avant qu’ils ne deviennent des contentieux. Elle peut, enfin, prendre en charge certaines procédures répétitives, comme les demandes d’état civil, les certificats, les permis, tout en garantissant une relecture humaine à l’arrivée.

Mais cela suppose une volonté politique. Il ne suffit pas d’introduire l’IA. Il faut oser s’en servir. Il faut accepter que l’efficacité devienne un objectif légitime du service public. Il faut concentrer l’effort humain là où l’intelligence artificielle ne peut rien : l’écoute, l’accueil, le discernement, la décision dans des situations complexes.

Sinon, on continuera de faire du numérique un maquillage technique sur un modèle institutionnel inchangé et de démontrer, une fois de plus, que ce n’est pas la technologie qui empêche la réforme de l’État. C’est nous.

Sujet de la veille :

WOW ! est un site expérimental, privé, indépendant, libre, 

dédié à la recherche sur l’ IA en tant que moyen d’information, d’écriture,

au débat d’idées et à la réflexion.

Tous les textes proposés sont générés par IA avec supervision humaine.
Aucun ne représente les opinions de WOW !
Pour toute question : contact@wow-media.fr

Retour en haut